mardi, janvier 09, 2007

Concurrence fiscale: Arnaud Montebourg enfonce le clou

Aujourd'hui le député socialiste Arnaud Montebourg réitère ses attaques et appelle à faire changer la loi fiscale suisse par la force !

Réponse du banquier Mirabaud (*1) sur le TJ de la TSR1 (Télévision suisse romande) de 20h ce soir: "cette attaque est indigne d'un politicien. M. Montebourg a oublié que la Suisse ne fait pas partie de l'Union Européenne."
Réaction de Luc Frieden, ministre luxembourgeois du trésor: "Cette critique a été faite dans le cadre de salons parisiens. La particularité fiscale suisse doit être respectée".

La Suisse doit-elle céder face à ces attaques ?

A quoi rime tout ce tintamarre ? Un petit tour d'horizon.

Origines
Le forfait fiscal a été introduit dans les années 1950 pour encourager les touristes étrangers à établir leur résidence principale sur les bords du lac Léman, une région très prisée des Anglais. Il est applicable uniquement à ceux qui n'ont pas d'activité lucrative en Suisse. Généralement, la valeur du logement choisi par le nouvel arrivant détermine le montant du forfait. La somme que l'étranger devra payer est négociée entre son représentant – souvent un avocat – et l'administration fiscale du canton où il veut s'établir.

Bases légales fédérales
C'est l'article 14 de la Loi fédérale sur l'impôt fédéral direct (LIFD) qui fixe le
cadre de l'imposition d'après la dépense.

Le Parti socialiste et l'extrême gauche réclament périodiquement depuis 2003 la suppression de l'article 14 LIFD, sans succès. A Genève, l'Alliance de gauche a échoué en 2004.

Qu'est ce le forfait fiscal suisse ?
Si vous remplissez certaines conditions (*2), vous pouvez bénéficier en Suisse d'un statut fiscal particulier par lequel vous payez une somme fixe d'impôt annuelle, sans rapport avec vos revenus ou votre fortune réelle. Et dans la plupart des cantons suisses, vous n'avez même pas besoin de remplir une déclaration d'impôt.

Cet arrangement fiscal est fondé sur une loi fédérale suisse et peut donc être invoqué partout dans le pays. C'est une originalité du système fiscal suisse dont ont jouit depuis des décennies de nombreux étrangers et parmi eux beaucoup de célébrités.

Comment calcule-t-on ce forfait ?

Le forfait fiscal suisse cherche à refléter le train de vie du contribuable. En théorie il est de 5 fois vos charges de logement. En pratique il s'établit sur le base d'une négociation, par l'intermédiaire d'une fiduciaire que vous avez au préalable mandaté pour la circonstance, avec les autorités fiscales du canton dans lequel vous comptez vous installer.

Si vous louez un appartement de 5 pièces pour CHF 4'000 par mois, le loyer annuel se monte à CHF 48'000 par an. Votre revenu imposable sera de 5 fois ce loyer annuel, soit CHF 48'000 x 5 = CHF 240'000. Votre forfait fiscal dans ce cas sera d'environ CHF 240'000 x 30%, soit CHF 72'000 par année.

Si vous possédez une maison qui vaut CHF 4'000'000, le fisc prendra comme base de calcul la valeur locative (cad le loyer perçu en cas de location) de votre maison selon le barême fiscal en vigueur, disons CHF 15'000 par mois pour un tel objet immobilier. La valeur locative annuelle sera de CHF 15'000 x 12 = CHF 180'000. Votre revenu imposable dans ce cas sera de CHF 180'000 x 5 = CHF 900'000, ce qui donne un forfait fiscal, en prenant le même taux d'imposition de 30% que ci-dessus, de CHF 270'000 par année.

Le taux d'imposition global dépend de chaque ville et de chaque canton (*3), car il existe des disparités entre les lieux.

Il y a certaines particularités qui sont prises en compte dans le calcul de l'imposition annuelle, particulièrement si vous possédez des avoirs suisses ou si vous désirez invoquer un traité de double-imposition pour récupérer des impôts payés à l'étranger.
Vous pouvez déduire de ces forfaits le montant des impôts payés à l'étranger à condition que ceux-ci fassent l'objet d'un traité de double imposition entre la Suisse et le pays concerné.

Au vu de tous ces paramètres, nous comprenons aisément pourquoi Johnny a décidé de venir s'installer à Gstaad.

Il a déclaré à Paris-Match que 70% de ce qu'il gagne va à l'impôt. "Est-ce que nous sommes obligés de subir et de financer l'incompétence de ceux qui nous dirigent? Ma réponse est non", dit-il. Comme il paye dans les CHF 6.7 mios (EUR 4.2 mios) par an au fisc français, son transfert en Suisse va lui rapporter la même somme moins le forfait fiscal de CHF 150'000 (EUR 94'000) à tout casser, soit CHF 6.5 mio (EUR 4.1 mio).

Mais croyez vous que Johnny va s'en tirer de cette manière ? Croyez vous que le fisc français va se laisser faire ? S'il veut récupérer des impôts français en vertu de la loi sur la double imposition, il va devoir affronter les rouages administratifs du fisc de l'hexagone. On lui demandera de démontrer que ses intérêts vitaux sont bien en Suisse et on cherchera à prouver le contraire par les lieux de ses concerts, les lieux d'utilisation de ses cartes de crédit, le lieu de scolarité de sa fille, etc etc ... Sans compter que Ségolène Royal risque encore de gagner les élections et durcir les impôts vis à vis des revenus aisés.

Loin de là, Johnny, la bataille n'est encore pas gagnée d'avance.


(*1): président de l'ASB, qui est l'Association suisse des banquiers, c'est à dire le banquier des banquiers suisses.

(*2)
Conditions pour l'obtention du forfait fiscal
- Avoir un passeport d'un pays de l'Union Européenne
- Etre résident Suisse avec un permis B ou C
- Habiter en Suisse au moins 180 jours par an
- Ne pas avoir travaillé en Suisse pendant les 1javascript:void(0)
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- (*3) Montants imposables minimaux: Genève CHF 500'000 (EUR 312'500), Vaud CHF 250'000 (EUR 156'000), Le Tessin CHF 160'000 (EUR 100'000), Valais CHF 150'000 (EUR 94'000).

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